Des leaders scientifiques féminines au Réseau des CCTT
La Journée internationale des droits des femmes est, pour le Réseau des CCTT, une occasion supplémentaire de souligner l’apport des femmes leaders à la tête de ses centres de recherche appliquée. Cette journée nous offre la chance de poser un regard sur le chemin parcouru et de souligner le travail important qui a été réalisé ces dernières années.
Selon les plus récentes statistiques du Réseau, 41 % des centres de transfert de technologies et de pratiques sociales novatrices (CCTT) sont gérés par des femmes. De plus, la présidence-direction générale du Réseau ainsi que la vice-présidence de son conseil d’administration sont également occupées par des femmes, soit Marie Gagné et Nancy Déziel.
Pour Marie Gagné, c’est une fierté de constater l’évolution du regroupement : « Comme réseau d’innovation, il faut montrer l’exemple et être innovant dans toutes nos façons de faire. Le fait d’avoir des femmes à la tête des CCTT, dont certaines d’entre elles sont issues de la diversité, c’est très important. On doit faire rayonner le leadership des femmes. Ça sert littéralement d’inspiration pour les générations à venir.»
Marie Gagné souligne d’ailleurs avoir vu l’évolution dans le nombre, mais surtout dans la place des femmes en lien avec les rôles stratégiques sur les comités. « Au-delà du nombre, c’est que les femmes prennent de plus en plus de place dans les discussions, dans le positionnement. Elles présentent des idées différentes. On est plus à l’aise de mettre de nouvelles idées l’avant. »
« Il y a 14 ans, on était à peine 5 femmes directrices générales [de CCTT] alors à quelque part, il fallait établir notre crédibilité. À l’intérieur du réseau ça allait bien, mais c’est plutôt à l’extérieur», affirme la vice-présidente du Réseau des CCTT, Nancy Déziel.
Je me souviens de m’être attaché les cheveux pour ne pas avoir l’air trop féminine, de devoir en faire plus pour prouver ma valeur. Mais je dirais que dans les 10 dernières années, ça a beaucoup évolué. Les femmes prennent leur place de plus en plus. -Nancy Déziel.
Nancy Déziel, femme de plusieurs chapeaux!
Nancy Déziel, en plus de ses fonctions de directrice générale du CNETE - CCTT en électrochimie et technologies environnementale - et de vice-présidente du Réseau, est également la présidente de l’Association pour le développement de la recherche et de l’innovation du Québec (ADRIQ) depuis mai. Elle est aussi administratrice sur les conseils d’administration du CRSNG et de l’IRNS. En tout, elle cumule un rôle sur 26 conseils, comités et commissions depuis de nombreuses années déjà.
« Ce que je trouvais, c’est que quand je parlais, on ne m’écoutait pas. Je ne pense pas que les gens faisaient ça consciemment, mais c’était un défi de faire entendre notre voix. Aujourd’hui, les gens sont plus sensibilisés et il y a une recherche d’inclusion, autant pour les femmes que pour d’autres types de population sous-représentés. C’est bien que tout le monde ait l’égalité des chances », souligne-t-elle.
Malgré les avancées, Nancy Déziel souligne que les femmes représentent encore un pourcentage minime au sein des carrières scientifiques. « Est-ce que les femmes considèrent que c’est un métier d’hommes? Est-ce qu’il n’y a pas assez de modèles pour s’identifier? Est-ce que c’est par méconnaissance de la profession? Peu importe la raison, il faut en faire la promotion et encourager les femmes à y aller, parce que je pense que la contribution des femmes est différente de celles des hommes. Elle amène une réelle valeur ajoutée », dit-elle.
« Quand on regarde dans le reste du monde, il y a des pays où les femmes n’ont même pas accès à l’école. Comme l’Afghanistan par exemple. Il ne faut jamais arrêter de faire la promotion du droit des femmes et d’en souligner l’importance », mentionne Nancy Déziel
Elle demande d’ailleurs aux femmes de se propulser entre elles. « Quand une femme cède sa place, il faut penser à promouvoir une autre femme. Même chose quand il est temps d’accéder à un nouveau poste. Je me fais un devoir, lorsqu’une position se libère, de penser à au moins une candidature féminine. Entre nous on va y arriver! », conclut-elle.
Zoraide Bentellis, directrice du CCTT en emballage et génie alimentaire, ITEGA
Zoraide Bentellis est active dans le milieu de la recherche appliquée depuis 22 ans, elle concilie recherche et enseignement et est à la direction de l’ITEGA depuis 3 ans. Scientifique et pédagogue, elle a à cœur la mission des CCTT.
« Ce n’est pas commun de voir une ingénieure dans l’industrie agroalimentaire. Une jeune femme de 24 ans qui arrive, équipée avec ses bottes et son casque de sécurité dans une usine, ce n’est pas commun », souligne-t-elle. Selon elle, il y a tout de même une certaine évolution dans les mentalités depuis les dernières décennies. Elle souligne que les nouvelles générations sont très ouvertes au nouveau leadership des femmes « Dans les générations précédentes, les femmes à la tête avaient plus de peine à s’intégrer. Dans la nouvelle génération, c’est beaucoup plus spontané. Si je mets une fille chef d’équipe sur un projet, les gars embarquent. Cette dualité de genre, je la sens beaucoup moins maintenant que par le passé », affirme Mme Bentellis.
Selon elle, c’est un enjeu pour les femmes que de trouver l’équilibre entre la femme, la mère et la professionnelle. « On porte plusieurs chapeaux à la fois et on est toujours en mode gestion. Je me devais d’équilibrer l’ensemble de façon à répondre à mes ambitions et à poursuivre mes objectifs ».
« À titre de directrice, je me conscientise à donner l’exemple. Les femmes ne devraient pas avoir de sacrifice à faire sur ce qu’elles aimeraient accomplir. On doit suivre nos ambitions et nos rêves et se dire qu’on a la capacité intellectuelle et physique de le faire », dit-elle.
Mme Bentellis croit que la Journée internationale des droits des femmes est une occasion privilégiée de mettre de l’avant le leadership féminin et d’aborder les difficultés que rencontrent les femmes. « On n’est pas obligées de fonctionner comme des hommes pour être performantes. On fonctionne comme des femmes et on est performantes. En plus, on est complémentaire aux hommes. Il faut juste que le milieu nous donne l’accès à cet espace de partage », croit Zoraide Bentellis.
« C’est vrai que c’est parfois encore difficile pour les femmes, qu’on doit démontrer triplement notre compétence pour accéder à certains postes de gestion, surtout dans le domaine scientifique. C’est pourquoi il est d’autant plus important d’en parler ouvertement. Ça créer un espace de réflexion. C’est important pour la suite des choses. » conclut-elle.
Claude Maheux-Picard, directrice générale du CCTT en écologie industrielle, le CTTÉI
Claude Maheux-Picard occupe les fonctions de directrice générale du CTTÉI depuis mars 2018, mais elle y œuvre depuis près de 20 ans. Sa conscientisation envers l’environnement a commencé très jeune, alors qu’elle apercevait les gens jeter leurs déchets par la fenêtre de leur voiture. Elle souhaitait faire quelque chose pour régler la situation lorsqu'elle serait plus grande.
Elle a fait son baccalauréat et sa maîtrise en génie. « Au début des années 90, il n’y avait pas beaucoup de formations en lien avec l’environnement et les emplois dans ce domaine, c’était essentiellement pour aider les grandes entreprises à répondre aux demandes du ministère de l’Environnement. Ce n’était pas pour faire avancer la cause, c’était pour aider les entreprises à rencontrer des critères », explique-t-elle.
Sa carrière a pris un tournant après qu’elle eut effectué un microprogramme en vérification environnementale à l’Université de Sherbrooke. C’est à ce moment qu’elle a eu l’occasion de joindre le CTTÉI, dont les valeurs étaient en tous points similaires aux siennes pour aider des entreprises à améliorer leurs pratiques et à réduire leur impact environnemental.
Œuvrant maintenant à la direction générale de l’organisation, elle souligne l’importance d’être bien entourée. « L’équipe qu’on a créée avec les années est vraiment engagée et dédiée à ce qu’on fait, c’est stimulant. Je me suis entourée de spécialistes en RH, en loi, en gestion financière. J’ai beaucoup appris », dit-elle.
Pour elle, la Journée internationale des droits des femmes se doit d’être célébrée. « C’est important de souligner cette journée, de prendre notre place. De le faire correctement aussi, de prendre notre place d’égal à égal. D’ailleurs, ce sont des valeurs que j’essaie également de transmettre à mes enfants », souligne Mme Maheux-Picard.
« C’est plate d’être obligé de mettre des quotas pour assurer un équilibre homme femme dans les entreprises. Ça devrait aller de soi. On a des façons de gérer différentes. L’écoute, la capacité de voir les choses sous un angle différent, l’intérêt à vouloir collaborer, à travailler en équipe, ça nous caractérise. Les femmes ont des forces notables qu’il est important de mettre en lumière », mentionne-t-elle.
« Je n’en reviens pas de toutes les opportunités que j’ai eues dans mon parcours : voyager à travers le monde, faire des rencontres enrichissantes, développer des liens forts avec des clients qui nous suivent depuis plusieurs années. Je pense que ces éléments devraient être mis de l’avant et partagés avec les jeunes filles pour leur donner le goût. Une carrière en science, ça peut être vraiment riche, autant sur le plan professionnel que sur le plan personnel », conclut-elle.
L’importance des modèles et des mentors
Toutes les leaders interrogées se font un devoir de faire la promotion des carrières scientifiques auprès des femmes. « Je trouve qu’on n’a pas assez de gens qui envisagent la science comme une carrière, car il y a peu de gens qu’on connaît qui sont des chercheurs en science. Quand on est jeune, on va chez le dentiste, chez le médecin, le mécanicien, à l’épicerie. On peut se projeter dans des carrières qu’on côtoie, mais on côtoie peu de gens en science », souligne Nancy Déziel.
« C’est important d’avoir des modèles et d’avoir des femmes qui peuvent nous mentorer sur le chemin à prendre, sur comment on se sent lorsque l’on arrive face à un défi et comment y répondre. Des modèles de femmes qui s’assument, dans des rôles de décision et dans les sciences. C’est important », ajoute Mme Déziel.
Claude Maheux-Picard souligne également cette importance du mentorat pour ouvrir la voie et susciter l’intérêt. « Ça prend de la curiosité. Il faut être capable de gérer le fait que, parfois, on a des frustrations parce que les résultats ne sont pas ce à quoi on s’attendait. Ça prend de la patience, de la rigueur, Il faut avoir tout ceci en tête et saisir l’opportunité, lorsqu’elle se présente, pour faire évoluer les pratiques. Imaginez la chance qu’on a d’exercer dans cette profession. Notre travail a un impact sur la vie des gens, sur la vie des entreprises, autant dans le domaine social que technologique » souligne Claude Maheux-Picard.
Pour Zoraide Bentellis, faire partie du Réseau des CCTT est un gros avantage. « C’est le réseau qui m’a fait sentir que je faisais partie d’un tout et que je n’étais pas seule. Il y avait d’autres exemples de femmes en position de leadership, dont la présidente-directrice générale du réseau. Ça m’a donné des étoiles dans les yeux et je me suis dit : en plus on est nombreuses. La société québécoise est rendue là! »
Zoraide Bentellis tient également à rendre hommage à la directrice générale du collège de Maisonneuve, Mme Malika Habel, qu’elle considère comme un modèle de leadership féminin qui soutient et met de l'avant la recherche appliquée collégiale ainsi que ses retombées. Mme Habel a notamment implanté la Certification d'Initiation à la Recherche qui est offerte à l'ensemble des étudiants et étudiantes. Cette certification a pour objectif de valoriser les carrières scientifiques auprès des jeunes.
Les CCTT sont aussi impliqués au sein des cégeps et collèges du Québec pour organiser des activités permettant de démystifier les opportunités de carrières en science auprès des étudiantes et étudiants. C’est maintenant l’avenir qui nous dira comment la société va évoluer!
Merci à toutes les femmes qui occupent des fonctions de direction au Réseau des CCTT – votre apport est précieux pour l’avenir de notre Québec plus innovant :
Marie-Pierre Dufresne (Biopterre), Nathalie Mercier (CCEG), Janic Lauzon (CDCQ), Isabel Cayer (CDRIN), Marie-Ève Drouin (Centre RISC), Christina Aon (CERASP), Julie Simard (CERFO), Élise Tousignant (CERSÉ), Corinne Pedneault (CIRADD), Christine Gingras (CISA), Lucie Russbach (CRISPESH), Édith Laflamme (CTE), Nadine Arbour (Écobes), Julie Côté (ExpésiSens), Chloé Bois (ICI), Julie Descormiers (INÉDI), Naoual Rahali (InnovLOG), Lorraine Blais (Solutions Novika), Paulette Kaci (Vestechpro) et Zoraide Bentallis (ITEGA), Claude Maheux-Picard (CTTÉI), Nancy Déziel (CNETE) et Rachel Berthiaume (LLio).
Merci également à toutes les femmes qui travaillent, toutes fonctions confondues, dans l’un de nos 59 CCTT et qui ont à cœur notre mission!
Bonne journée internationale des droits des femmes à toutes!