Détecter l’alzheimer… en un clin d’oeil?
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Une caméra unique en son genre permet d’ouvrir une fenêtre insoupçonnée sur la maladie d’Alzheimer.
Saviez-vous que la rétine, cette membrane au fond de l’œil qui transforme la lumière en influx nerveux, est en fait considérée comme une partie du cerveau ? Elle en est aussi la seule directement visible. Chez les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer, on peut y noter des dépôts d’amyloïde, l’un des principaux marqueurs de la pathologie. La présence de ces agrégats pourrait même permettre le diagnostic précoce de la maladie, avant que les troubles de la mémoire se manifestent. À condition toutefois de croquer des images en très haute résolution de ce mince disque transparent qu’est la rétine. Un sacré défi !
« À l’heure actuelle, la tomographie par émission de positons [ou PET scan en anglais] du cerveau est un des seuls outils de diagnostic de la maladie d’Alzheimer. Il s’agit néanmoins d’une technique d’imagerie médicale longue et coûteuse, en plus d’être assez invasive », ajoute Jean-Philippe Sylvestre, chef de la direction technologique chez Optina Diagnostics.
La firme montréalaise se positionne comme un chef de file dans la détection précoce de la démence… par la rétine. Grâce à une puissante caméra optique et à l’intelligence artificielle, elle ambitionne d’offrir sous peu un test de dépistage du statut amyloïde cérébral, le premier du genre. Fait intéressant : l’Optina-4C – c’est le nom de la caméra rétinienne – a été développée en partenariat avec Optech, un centre de recherche appliquée en optique photonique rattaché au Réseau des Centres collégiaux de transfert technologique (CCTT) — Synchronex.
La qualité avant tout
« Notre collaboration dure depuis plus d’une décennie », raconte Maroun Massabki, directeur général d’Optech. Au début, il était question d’utiliser la spectro-imagerie pour améliorer le diagnostic de différentes maladies de l’œil, comme la dégénérescence maculaire liée à l’âge. En gros, il s’agit de capter et d’analyser l’intensité de la lumière réfléchie par la rétine à différentes longueurs d’onde, un peu comme on le fait avec le spectre des étoiles en astronomie. « Optina souhaitait dès le départ vendre des images de diagnostic, se souvient-il. Cela nous a séduits, car c’était assez nouveau à l’époque. »
De fil en aiguille, la caméra hyperspectrale a rapidement atteint des performances optiques inégalées, de l’ordre de plus de 90 millions de pixels par acquisition. Elle a d’ailleurs reçu le label « Innovation de rupture » par la Food and Drug Administration américaine (FDA) en 2020. C’est grâce à cette résolution quasi cellulaire qu’elle s’est par la suite imposée comme un outil facilitant le diagnostic de maladies systémiques. « On parle de la maladie d’Alzheimer, bien sûr, mais aussi des maladies cardiovasculaires », indique Jean-Philippe Sylvestre. La rétine est après tout un organe hautement vascularisé.
Le jour où les spécialistes de l’ophtalmologie assureront le suivi ou le diagnostic de la maladie d’Alzheimer est cependant encore loin. La solution commercialisée par Optina est pour l’instant réservée à la recherche et, donc, non disponible sur le marché. « Nous comptons présenter les résultats de notre étude pilote à la FDA d’ici la fin 2024, indique l’ingénieur-physicien. À moyen terme, notre test de dépistage pourrait servir à déterminer qui devrait bénéficier des traitements visant à ralentir la progression de l’amyloïde. »